2 – Slimane
Retour à l’introduction : Immersion
Slimane
{Emery}
Le premier homme de terrain que je rencontre est Slimane Arif. Il m’a donné rendez-vous au 90 cours de Vincennes à côté du sanitaire devant lequel il y a la queue. Il est accompagné par Boubacar, un intérimaire en reconversion de quarante-cinq ans. Ils ont tous les deux revêtu la tenue blanche sanitaire anti-Covid. Comme pour Claude, c’est un ami qui l’a aidé à rentrer chez JCDecaux, il y a deux ans et demi. Avant, il avait roulé sa bosse dans le monde de l’automobile aussi bien dans les ateliers que dans les magasins.
Il est dynamique, je le regarde s’affairer et indiquer à son intérimaire comment agir efficacement. Quand je lui demande s’il trouve des choses bizarres dans les toilettes parfois, il me fait un signe de la main pour que je le suive. A l’arrière, se trouve le bloc technique qui permet de récupérer, dans une poubelle dédiée, les détritus repoussés par le jet de lavage. Il me dit qu’il ne « plonge jamais les mains dans cette poubelle. Je prends la pince pour retirer un à un les détritus et notamment les seringues qui trainent. Aujourd’hui, c’est une petite matinée, il n’y en a qu’une quinzaine ». Dans d’autres secteurs de Paris, notamment à côté des salles de shoot, on en retrouve une centaine par jour. Les seringues ne vont pas à la poubelle, elles sont apportées à la déchèterie pour une destruction adaptée au danger qu’elles représentent. Ils ont été formés à faire attention à tout et à tous. La rue est un lieu qui parfois est dangereux. Ils ont notamment appris à ne pas entrer en conflit avec « les toxicos et les alcoolos ». Au moindre danger, ils n’approchent pas de leur lieu de travail et si le danger persiste, ils doivent prévenir la police.
Ce futur père me raconte aussi que son métier va au-delà du simple nettoyage d’un lieu et d’un réassort de papier toilette ou de savon, il y a toute une partie électrique qui demande des compétences spécifiques. Le local technique abrite un vrai petit ordinateur de bord « C’est le cerveau ! ». Boubacar n’a pas encore le droit de toucher à cette partie, il est en apprentissage sécurité et nettoyage.
Nous nous séparons à la hauteur de sa camionnette aux couleurs de son entreprise. Il me dit que lorsqu’il aura déménagé, il pourra rentrer chez lui avec parce qu’il habitera à moins de vingt-cinq kilomètres de Paris. Je lis une fierté dans ses yeux.